La résilience, une nouvelle façon de penser pour réduire la pauvreté

L'aide au développement a atteint un nouveau sommet avec 142 milliards de dollars, d'après les récentes données de l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques).

Récemment, dans le journal Science Advances, des chercheurs basés en Suède et en Australie remettent en question une pierre angulaire de l'aide au développement: le "piège de la pauvreté" et sa solution le "Big Push" (c'est-à-dire d'une aide massive à tous les secteurs afin de favoriser le développement.): les organismes d'aide injectent des liquidités pour les semences, les engrais et les machines, par exemple dans les économies rurales qui sont alors prises dans un cercle vicieux de sous-développement. En théorie, cela doit pousser ces économies sur la voie du progrès. Cependant, depuis des décennies, cette approche singulière est régulièrement critiquée car elle peut conduire à une pauvreté toujours plus persistante dans certains endroits, car la culture et la nature sont ignorées.

D'après Jamila Haider, co-auteur principale du Centre de Résilience de Stockholm: "pour la première fois, nous apportons un moyen d'étendre la réflexion sur les pièges de la pauvreté en incluant plus pleinement les liens entre le bien-être financier, la nature et la culture. Cette nouvelle approche rend difficile pour les agences de développement d'ignorer une plus large gamme d'options et de solutions"
La résilience, une nouvelle façon de penser pour réduire la pauvreté
A l'aide de la pensée résiliente, les chercheurs ont pu intégrer des interactions complexes en lien avec la sécurité économique, la culture et l'environnement, dans le concept du piège de la pauvreté. Ces idées fournissent des voies alternatives pour la réduction de la pauvreté. Crédit: Stockholm Resilience Centre. Design: Azote, E. Wikander and E. Wisniewska

La recherche pourrait contribuer à une meilleure intégration des objectifs de développement durable de l'ONU. Pour Steven Lade, co-auteur principal du même centre: "Les objectifs exigent le doublement de la productivité agricole d'ici 2030. Ignorer les facteurs culturels et environnementaux pourrait accroître le risque de pièges à la pauvreté."

Avec 78% des personnes les plus pauvres du monde vivant dans les zones rurales, l'aide au développement vise souvent des solutions financières et technologiques agricoles rapides. Le "Big Push", l'une des pus anciennes théories de développement économique, reste toujours une approche populaire unique, malgré ses limites connues.

Les agences de développement encouragent souvent les agriculteurs vers des monocultures rentables, comme le coton OGM en Inde qu'ils peuvent vendre pour sortir de la pauvreté, avec des résultats mitigés.

Bien que cela soit un succès dans de nombreux endroits, cela peut aussi mener à la déforestation, à la pollution à l'azote et au phosphore, pour ne citer que quelques conséquences environnementales.

Dans certains cas, cela a créé un cycle de pauvreté où des variétés de semences "améliorées" ont échoué en raison de la négligence des conditions environnementales locales et de la culture, laissant la terre dans un état pire qu'auparavant, et faisant perdre de précieuses connaissances; le piège de la pauvreté est alors renforcé.


La nouvelle approche de l'équipe, classifie trois types de solutions pour alléger la pauvreté.


La première est le Big Push classique, "au-dessus de la barrière".

La seconde consiste à "baisser la barrière": cela pourrait inclure la formation des agriculteurs pour changer les comportements et les pratiques.

Ces deux classifications constituent l'épine dorsale des stratégies d'aide actuelles.

Les chercheurs ont introduit une troisième classification qu'ils appellent "transformer le système".  Il s'agit de repenser fondamentalement la stratégie d'intervention. Par exemple,  encourager un agriculteur à consacrer une partie de ses terres cultivées intensivement à des cultures locales gérées de manière traditionnelle afin de maintenir des variétés de graines résilientes.

D'après Haider: "si la pauvreté dans une région cause des dégradations environnementales, alors peut-être que la stratégie "big push" fonctionnera. Mais si les terres ont été gérées de manière durable pendant des générations, alors les agences de développement ont besoin d'une nouvelle approche qui prend ces connaissances en considération. Cela semble évident, mais les stratégies d'intervention peuvent être aveuglées par des modèles économiques puissants mais simplistes. Certaines communautés sont restées résistantes depuis des générations, par exemple en utilisant de nombreuses variétés traditionnelles de semences. Nous montrons comment les interventions en développement doivent s'adapter en fonction des différentes relations entre la pauvreté et l'environnement. Ces modèles pourraient être utilisés dans la planification du développement afin de rendre explicites les connaissances et les hypothèses disponibles de chaque différents cas."

Lade ajoute que "plutôt que d'augmenter la production à travers des intrants de capital physique, la transformation offre une production accrue en raison de l'augmentation du capital naturel et du capital culturel. C'est une approche alternative permettant d'analyser les investissements pour l'intervention. Lorsque les risques sont élevés, l'aide traditionnelle échouera, cela donne des options pour explorer et mettre en œuvre des stratégies alternatives axées sur la transformation construite sur des pratiques culturelles historiquement réussies pour gérer l'écologie locale".

 La résilience permet de sortir du piège de la pensée concernant la réduction de la pauvreté.


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